samedi 12 juin 2010

Argentine-Nigéria


Lieu : Bar-Restaurant El Sur 35, boulevard Saint-Germain Paris 5
Commentaires : TF1 au plus bas.


Centre culturel, boutique, bar-restaurant, El Sur est bien connu dans le microcosme argentinophile parisien. La viande y est bonne et si l’envie subite d’acheter du maté vous saisi, les possibilités sont infinies. Palo, sin palo, Gaucho, au citron, Cruz de malta, tous les choix sont permis, et seuls, les spécialistes auront compris
Cependant, que l’on ne s’y trompe pas. El Sur n’est pas une vulgaire cantina. Ici, cela se sent, tout respire le quartier latin. Exposition de peintures, livres bien rangés, émissions de France Culture programmées, la première barra brava est à des milliers de kilomètres.
Alors, devant le rétroprojecteur habituellement dévolu à des films d’auteur, c’est une clientèle sérieuse et cultivée qui a pris place.

La cuisine est fermée, c’est exceptionnel, les cocineros font la pause, impossible de manger, pas même une empanada, une jolie blonde fait la moue. Elle attrape une bière Quilmes et rejoint ses copines multicolores. Seleccion ou pas, l’important c’est le club, et bleu et blanc concurrencent les hommages à Boca, River ou Atlanta.
L’hymne est avalé sans respect, le match commence à pas feutrés devant un parterre concentré.
Seul, en couple ou avec des amis, on n’est pas là pour rigoler. Le foot, c’est du sérieux. Lorsque l’Argentine marque, on s’emballe juste ce qu’il faut pour revenir à l’essentiel. Tactique, positionnement, les commentaires sont chuchotés d’une oreille à l’autre entre deux gorgées de maté.
Peu d’interjections. A part quand Diego Maradona fait le pitre. Il a un très beau costume remarque l’un. Il porte deux montres répond l’autre.
C’est la mi-temps. On remplit les thermos d’eau chaude et on sort fumer des cigarettes courtes pour pousser un premier ouf. La blonde est très contente. Elle a acheté des gaufrettes au chocolat. Les mêmes que lui donnait sa grand-mère quand elle revenait du collegio.
Paul arrive pendant la seconde période. Mais ne peut me rejoindre. La salle est pleine à craquer et il n’est pas question de déranger. Il demeure accoudé au comptoir avec un étudiant chevelu.
La situation n’évolue pas. L’Argentine gagne mais l’inquiétude aussi. La parole est rare. Un joueur prend un ballon mal placé. Un rire nerveux parcourt l’assistance.

Ca y est. C’est la fin. Accouchement réussi, quelques langues se délient avec une fierté mesurée. La victoire relève d’une logique universitaire programmée. On fanfaronnera plus tard. Après la finale. Déjà, les tables sont débarrassées et on rallume la parilla. Il est plus que temps de redresser les tableaux qui, eux aussi, ont tremblé.