dimanche 27 juin 2010

Angleterre-Allemagne


Lieu : The Bombardier 2, place du Panthéon, Paris 5.
Commentaires : BBC audible.

L’après-midi est chaude. Propice à coup de soleil. Habitués et touristes d’outre-manche se sont passés le mot. Les femmes à la maison. Les hommes au Bombardier. Le vieux pub déborde bruyamment sur le parvis sage de l’Eglise Sainte Geneviève.

Un videur a été engagé pour réguler le flux vers le comptoir. Crâne rasé, tatouages derrière les oreilles, yeux hagards pierciés, il fait peur. Par provocation, il arbore une cape aux couleurs allemandes.
La confiance règne. Les mobiles s’agitent. Il est encore temps de parier. Quel sera le premier buteur anglais ? Combien de buts marqués du pied gauche ? Les sommes sont mirobolantes. Le videur s’esclaffe. Il lui manque les trois dents de devant. Le sourire de la malchance.
God save the queen n'est pas chanté. A peine murmuré et recouvert par des Go England.
Sueurs et odeurs se ramassent à la pelle. Impossible de bouger. On s’accroche aux poutres. La fraîcheur de la pierre de taille est une légende. Les sous-bocks servent d’éventail. Come on boys ! Un type commande deux pintes. Il en écluse une cul sec. Et s’en retourne avec l’autre, la serre de trop près. Crac, le verre en plastique explose dans l’indifférence générale. Wake up sons ! Le ballon a franchi la ligne. Malédiction. La revanche du destin. Flag ! Flag ! Et une bordée d’injures mâchonnées et incompréhensibles.
Mi-temps. De l’air. De l’air. On rajoute des glaçons dans sa mousse. C’est pas fini. Courage. Donne–moi une Red Bull. Des touristes français en visite au Panthéon s’interrogent sur le sens de cette manifestation. Les frenchies avec nous. Dites-moi, que vous non plus, vous n’aimez pas les prussiens.
La puissance allemande est totale. Coup de poing sur les tables en bois. Paquets de chips explosés. Incredible. Le pub se liquéfie de désespoir. L’espace se desserre. On peut presque s’asseoir. Plus besoin de sous-bock. J’aperçois enfin la moquette absorbante verte et d’élégantes gravures de bateaux. Un tableau annonce l’origine de la viande servie au pub. Bœuf : Pays bas et Argentine. Porc : Angleterre. Agneau : France et Irlande. L’œil est terne. Le chapeau à clochettes bas. Reste l'honneur. La fin du match s’aperçoit dehors, depuis les fenêtres. Too sad.

La défaite est consommée. The dream is over a dit la télé. Des sous-bocks désintégrés jonchent le sol. Le videur, armé d’une petite pique, part à la pêche. Les filles arrivent pour la dernière pinte avec les sacs d’emplettes et des tongs au pieds.
Toujours des pronostics. Sur les gros titres de la presse nationale de demain. Sans plus rien avoir à perdre.